Non-mise en application du décret portant gestion du fret en provenance et à destination du Burkina Faso, tracasseries routières, rackets et extrême surcharge des camions. Tels sont les points qui suscitent la colère de l’Union des chauffeurs routiers du Burkina (UCRB), qui l’a fait savoir au cours d’une conférence de presse qu’elle a animée le vendredi 4 septembre 2020 à son siège à Ouagadougou. L’UCRB menace de prendre ses responsabilités si rien n’est fait.
L’Union des chauffeurs routiers du Burkina (UCRB) se souvient avoir demandé au gouvernement, en 2018, la refonte globale du système de gestion du fret à destination du Burkina Faso à l’image de la pratique ayant fait ses preuves sur le corridor ghanéen. Un protocole d’accord a été signé à cet effet le 27 août 2018, suivi d’un décret adopté le 26 février 2020 en conseil des ministres. « Mais la situation va de mal en pis », regrette Brahima Rabo, président de l’UCRB.
- La conférence a mobiliser plusieurs militants de l’Union des chauffeurs routiers du Burkina.
Il explique que les intermédiaires communément appelés « coxers » se sont emparés du fret au niveau des ports et font la part belle aux camions étrangers moyennant des commissions allant de 100 000 à 200 000 francs par camion chargé. Les camions burkinabè sont chargés à des coûts inférieurs aux camions étrangers. Des situations, selon le président, qui contraignent les camions burkinabè à séjourner pendant près de deux mois à la recherche du fret. Inutile de dire que ces pratiques pourront anéantir l’industrie des transports au Burkina.
« Nous avons fondé un grand espoir quant à l’adoption du décret qui allait permettre la mise en place d’un mécanisme réglementaire efficient de la gestion du fret généré par le commerce extérieur du Burkina Faso. Ce mécanisme apportera des innovations majeures parmi lesquelles l’institution de façon précise du bon de chargement qui sera un document obligatoire donnant droit à l’enlèvement du fret et va permettre le respect des quotas de répartition tels qu’inclus dans les accords bilatéraux et multilatéraux signés entre le Burkina Faso et les autres pays. Nous interpellons donc le gouvernement sur la diligence qu’il faut donner à ce dossier au regard des grognes suscitées çà et là et au regard du caractère sensible du secteur pour l’économie du pays », s’est étalé Brahima Rabo.
- En jaune au milieu, Brahima Rabo, président de l’Union des chauffeurs routiers du Burkina, principal conférenciers
Pour le second point qui concerne les tracasseries routières au Burkina Faso, le conférencier annonce qu’il s’agit pour eux d’attirer l’attention des gouvernants sur la multiplicité des postes de contrôle de documents sur les axes et qui ne répondent pas aux aspirations des Burkinabè en matière de sécurité. Il considère l’exemple de l’axe Ouagadougou-Dori, qui n’avait que quatre postes de contrôle ; et se retrouve aujourd’hui avec une douzaine de postes.
« Pis, les postes de contrôle exigent le paiement d’une commission avant de vous laisser passer », s’agace-t-il. A la question de savoir la part de responsabilité des chauffeurs routiers, Brahima Rabo informe que plus de 90% des chauffeurs ont leurs pièces au complet. Et malgré cela, la personne qui paie une commission est libérée plus rapidement qu’une personne qui a ses pièces au complet.
Il informe qu’au dernier rapport de l’Observatoire des pratiques anormales (OPA), qui est un instrument de constat et d’interpellation des différents pays membres de la zone UEMOA en termes de mauvaises et de bonnes pratiques, le Burkina Faso figure parmi les mauvais élèves en termes de libre circulation des personnes et des biens dans l’espace UEMOA.
Pour les conférenciers, depuis l’installation du climat d’insécurité, le Burkina Faso est devenu une terre inhospitalière pour les véhicules en transit. Des sommes allant de 1 000 à 5 000 francs par poste de contrôle sont réclamées afin de faciliter le passage des véhicules en transit. Un véhicule de transport de personnes débourse environ 150 000 à 250 000 francs comme frais pour traverser le pays.
Selon Brahima Rabo, une commission de réflexion et de propositions de solutions en vue de réduire significativement les tracasseries et les rackets routiers avait été mise en place. La corruption et les rackets systématiques ont gangrené les axes routiers, dit-il, avant de revendiquer : « Nous sollicitons une mise en application diligente des conclusions de la commission afin de redorer l’image du Burkina Faso ».
Le troisième point est relatif à la lutte contre l’extrême surcharge, rappelle Brahima Rabo. « Les véhicules à l’importation quittent les plateformes portuaires surchargés et empruntent nos axes routiers au vue des forces chargées du contrôle de la surcharge. L’UCRB s’insurge aujourd’hui contre ces pratiques parce qu’elles mettent en péril la vie des conducteurs que nous sommes et des usagers que vous êtes », a expliqué le président de l’Union.
Selon lui, ces pratiques détruisent le patrimoine routier et favorisent la fraude sous toutes ses formes. « Aujourd’hui, il n’est pas rare de voir des véhicules qui ne répondent à aucune norme technique sur nos routes et qui circulent avec tous les documents afférents à jour. Où sont donc passées les structures chargées de ce contrôle ? Nous voulons préserver nos vies et celles des autres à travers des comportements responsables. Le chauffeur n’est ni de près, ni de loin mêlé à ces pratiques qui mettent sa vie en danger », s’est-il défendu.
Pour l’Union, la structure de contrôle mise en place à cet effet, qu’est l’Office national de sécurité routière (ONASER), peine à accomplir convenablement sa tâche. Pour ce faire, elle recommande l’application intégrale du R14/2005/UEMOA avec délestage des marchandises, qui seul peut permettre d’atteindre les effets escomptés. Pour conclure, les conférenciers promettent que si rien n’est fait, l’UCRB prendra ses responsabilités.
Etienne Lankoandé
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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