Le procès du putsch du CND a pris un autre tournant ce lundi 28 janvier 2019 avec le début de passage des témoins. Pour ce premier jour de passage les parties ont pu écouter, Jean Bénédicte Bi-Ila agent de renseignement du Général Bassolé et Alidou Sawadogo, gardien de devises pour le Général de Gendarmerie.

Fini l’interrogatoire des accusés, place aux témoins maintenant. Pour ouvrir le bal des témoins du parquet militaire, Jean Bénédicte Bi-Ila. Agent en service au Fonds d’appui à la formation professionnelle (FAFPA), une direction du ministère en charge de la Jeunesse, Bi-Ila a joué le rôle d’agent de renseignements du Général Bassolé pendant près de 20 ans. Selon sa propre relation des faits son travail de renseignement a débuté depuis le lycée au moment où il occupait le poste de délégué AESO (Association des élèves et scolaire de Ouagadougou).

Le témoin n’est pas passé par quatre chemins pour dire qu’il donnait des renseignements au Général Djibril Bassolé. Lorsque ce dernier n’était pas disponible, il le referait à un certain Major Bado du Centre de renseignement et de traitement des informations de la Gendarmerie. Appréhendé et incarcéré dans le cadre de l’affaire du putsch, il a bénéficié d’un non-lieu et le parquet l’a cité comme témoin.

D’entrée de jeu, le parquet fait lecture des retranscriptions des échanges téléphoniques que Bi-Ila aurait eus avec le Général Bassolé et le Colonel major Boureima Kiéré. Le témoin semble avoir un trou de mémoire et rétorque qu’il n’a pas souvenance de telles conversations téléphoniques et que ces écoutes ne lui ont même pas été opposées lorsqu’il avait la qualité d’accusé.

Me Dieudonné Bonkoungou trouve que les éléments sonores que le Parquet militaire utilise pour que Bi-Ila puisse témoigner contre son client Bassolé sont les mêmes qui avaient milité à l’inculpation du témoin en question. Mais curieusement, ces mêmes éléments ne sont plus des infractions pour le sieur Bi-Ila, mais demeurent des infractions pour les autres. Alors qu’il n’y a jamais eu de confrontation. Ce qui n’est pas normal selon l’avocat. « C’est tout là l’indécence de la présence d’un prévenu qui a bénéficié d’un non-lieu en tant que témoin », lance Me Bonkoungou.

Me Guy Hervé Kam, un des avocats des parties civiles trouve qu’il n’y a aucune indécence à ce qu’un ex-accusé soit témoin. C’est une question de procédure. « En droit la seule prudence qui est recommandée au juge est de ne pas entendre quelqu’un sur qui pèse des accusations », souligne-t-il. S’adressant au témoin, Me Kam trouve curieux qu’il ne se souvienne de rien alors qu’il a juré devant la juridiction de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Et selon l’article 120 du Code de justice militaire, si le témoin fait de fausses déclarations sous serment le président du tribunal peut ordonner son arrestation rappelle-t-il à son vis-à-vis avant de poursuivre avec ses questionnements.

A la question de savoir à quand remonte la dernière fois que le témoin a vu l’accusé Bassolé. Bi-Ila réplique qu’en 2015. Ce qui n’est pas vrai selon l’avocat qui affirme qu’à la Barre le Général Bassolé a affirmé qu’il le voyait toujours. Le témoin tente de s’expliquer avant de lâcher qu’il a vu le Général Bassolé en 2018 lorsqu’il est sorti de prison : « je suis allé le voir ». Selon Me Prospère Farama, le témoin a beau avoir des trous de mémoire seulement il ne dénie pas le contenu de la retranscription des écoutes téléphoniques. Il ne s’en souvient seulement pas.

Le second témoin auditionné est Alidou Sawadogo, « gardien de devises » pour le Général Bassolé. Selon son récit, il est le « bon petit » de Djibril Bassolé car l’ayant servi lorsqu’il était ministre aux affaires étrangères comme Chef de protocole. Par moment, il gardait de l’argent pour son ancien patron pour faire les petites courses et même échanger des devises étrangères pour lui. Accusé au départ, il a bénéficié d’un non-lieu et fait office de témoin du parquet.

Le sieur Sawadogo reconnait avoir donné la somme d’un million de francs CFA au journaliste Adama Ouédraogo dit Damiss le 17 septembre 2015 de la part du Général Bassolé qui n’était pas à Ouagadougou. Il reconnait que ce n’était pas la première fois qu’il faisait une telle commission car de temps à autre le Général lui remettait de l’argent pour Damiss. C’est encore Alidou Sawadogo qui a remis les 5 millions du Général Bassolé à Ismaël, fils du Général Diendéré.

En prenant l’argent avec son ancien patron, il ne savait pas qu’il s’agissait de Ismaël Diendéré. Son ancien patron lui a juste remis le montant avec un numéro, lui disant de donner l’argent à Ismaël car il avait des problèmes de famille. La destination de l’argent, il ne saurait le dire. Le témoin dit ne pas être au courant que le montant a été distribué à des ex-RSP pour résister. L’audition du second témoin Alidou Sawadogo se poursuit ce mardi 29 janvier 2019.



Marcus Kouaman

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Source: LeFaso.net