Chers frères ! Je n’emploie pas le mot frère sans raison. Depuis des décennies, nos deux peuples ont vécu ensemble. Un travailleur voltaïque qui épouse une belle Agni ou une belle Bété fait des enfants. Un Ivoirien épouse une Voltaïque et fait des enfants. Ces enfants se marient à leur tour et font des enfants. Puis ces petits fils se marient à leur tour et font des enfants.

Ce sont nos petits-enfants communs aux Ivoiriens et aux Burkinabè et leurs descendants que vous appelez aujourd’hui des Bouki ? Comment parvenez-vous à prendre l’un d’eux et à mesurer en lui la bonne dose de sang ivoirien et la bonne dose de sang burkinabè ?

Un Voltaïque qui vient en Cote-d’Ivoire, vient pour travailler. Rassurez-vous, ce premier travailleur connaît ses origines et tient à son village d’origine. Aujourd’hui, en Europe où je vis, mes amis ivoiriens connaissent leurs origines et tiennent plus que tout à ces origines.

Si vous leur demandez, ils vous diront que leurs enfants nés en Europe se sentent moins attachés à leurs origines africaines. Dites-moi s’il vous plaît, ce qui est valable pour un immigré ivoirien en Europe serait-il un tort pour un Africain vivant en Côte-d’Ivoire ? Et quelle fierté tire-t-on à insulter ainsi des gens sans raison valable ?

Quand les Burkinabè viennent dans votre pays, est-ce qu’ils respectent les lois de ce pays ? Est-ce qu’ils respectent les mœurs culturelles de ce pays ? Si vous répondez “oui” à ces questions, pouvez-vous me dire qu’est-ce qui permettrait à une ressortissante de la Côte-d’Ivoire de prétendre venir piétiner nos lois et nos habitudes culturelles ?

Je m’adresse à mes frères ivoiriens qui ont su garder la tête froide. Parlez à vos frères au sang chaud qui insultent tout un peuple à cause d’un malheureux incident ! Pouvez-vous soutenir que tous les 20 millions de Burkinabè étaient à l’aéroport lors de cette affaire minable ? Si vous répondez “non” à cette question, reconnaissez que vous avez maltraité la dignité de millions de personnes qui ne vous ont rien fait. Et quand on insulte quelqu’un qui ne vous a rien fait, quelqu’un qui est dans son bon droit, on se doit de présenter des excuses à cette personne. C’est ce que disent tous les préceptes de la bonne éducation.

Sayouba Traoré

Ecrivain-Journaliste

Source: LeFaso.net