Aller à la Maison-Blanche chez Donald Trump devient un exercice périlleux pour les présidents des autres pays du monde, car ils devront faire face à une entreprise de déstabilisation qui les présentera sous un jour peu favorable et, par ricochet, augmentera la puissance du président des États-Unis. En allant à Washington, le président sud-africain comptait inviter son hôte au G20 qu’il accueille chez lui et lui parler des droits de douane que son pays doit payer selon la nouvelle administration. Ce sont des sujets au cœur de la relation bilatérale. Il savait cependant que le principal allié politique, économique et militaire d’Israël n’allait pas le congratuler pour sa plainte à la Cour pénale internationale pour génocide contre ce pays. S’attendait-il à ce que ce soit lui et son pays qui soient accusés de génocide des Blancs ?
Le 47ᵉ président des États-Unis d’Amérique, Donald Trump, a été, dans une vie antérieure, un homme d’affaires milliardaire, animateur, producteur de télévision. C’est un ancien animateur de téléréalité qui a élu domicile à la Maison-Blanche et le bureau ovale est devenu un studio de production d’une émission de grande audience où la presse américaine est conviée aux spectacles, où le président américain se met en scène avec ses invités en tant qu’animateur principal du show MAGA (Make America great again) qui doit montrer la grandeur de l’Amérique et de son président à ses partisans au détriment de ses visiteurs. Est-ce vraiment la volonté de transparence et de redevabilité envers le peuple qui guide Donald Trump quand les caméras du monde entier sont conviées à ces entretiens où, aidé de son vice-président parfois, il essaie de rabaisser, voire d’humilier, son hôte, nous montrant comment s’exprime l’hospitalité des dirigeants américains élus sur la haine de l’immigré qu’il faut chasser et déporter des États-Unis ?
Après le clash avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dont il a reconnu en professionnel des médias pendant la séquence qu’elle battra des records d’audience, la présidence des États-Unis d’Amérique a organisé un autre spectacle le mercredi 21 mai 2025 avec le président sud-africain Cyril Ramaphosa, pour montrer comment, selon lui, la nation arc-en-ciel, le pays de Nelson Mandela, est devenu un pays raciste anti-blanc, où les Blancs sont tués dans les rues et dans les fermes, un pays raciste qui procède au génocide des Blancs. Flash-back sur cette rencontre pour voir pourquoi l’Amérique de Trump et de Musk (ce natif d’Afrique du Sud) en veut au pays qui s’est défait de l’apartheid. Quel est le rapport des vidéos et des photocopies de Donald Trump présentées au monde avec la vérité ?
La violence tue plus de Noirs que de Blancs
Le président américain a de la suite dans les idées. Et pense qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Aussi a-t-il son propre réseau social, Truth. Ainsi la vérité est celle qui vient de lui. Ce n’est pas une part de la vérité qu’il détiendrait, mais sa totalité, selon son entendement. Les réseaux sociaux avec l’accès de tous à ces médias font que toutes les interprétations d’un fait, toutes les opinions sur l’actualité sont proposées et sont au même niveau, quand bien même tous ceux qui parlent n’ont pas la même légitimité, la même compétence sur les sujets. Le bureau ovale a été le lieu de diffusion d’une infox, d’une fake news, comme nous allons le voir dans ces lignes. La vérité selon Trump a brisé tous les liens avec la réalité.
Nous avons eu droit à une mise en scène pour faire de l’opinion particulière de Donald Trump et de celui qui a contribué financièrement à son élection, Elon Musk, la vérité, donc la réalité. Le président Donald Trump, comme certaines personnes, ne considère plus la vérité comme une valeur universelle que nous devons tous respecter indépendamment de nos opinions, de nos croyances, de nos couleurs de peau, de nos appartenances ethniques, etc. Devant la délégation sud-africaine, il a fait éteindre les lumières pour diffuser la vidéo de l’horreur : comment l’Afrique du Sud tue les fermiers blancs, a des politiciens qui appellent au meurtre de Blancs, etc.
Ensuite, il a présenté des photocopies qui montreraient des meurtres de Blancs en Afrique du Sud. Mais malheureusement, c’est une vidéo faite avec des images manipulées qui ne sont pas d’Afrique du Sud pour certaines, pour faire accepter cette fameuse idée du génocide des Blancs en Afrique du Sud. Donald Trump pense que les Blancs sont victimes de racisme et que l’Afrique du Sud serait une nation génocidaire de Blancs alors qu’elle porte plainte contre Israël pour génocide des Palestiniens. Pour preuve de cette persécution et de cette fuite de l’enfer sud-africain, Donald Trump a cité les 50 Sud-Africains qui ont demandé le droit d’asile aux États-Unis et y sont arrivés le 12 mai 2025.
Réponse du président sud-africain qui a gardé son calme face aux accusations de génocide des Blancs dans son pays et qui s’était préparé à cette fameuse question en composant une délégation avec des Afrikaners et deux des anciens champions de golf Ernie Els et Retief Goosen, que Donald Trump connaît bien. Si le gouvernement sud-africain faisait un génocide, ces Afrikaners ne feraient pas chemin avec les assassins de leurs frères depuis l’Afrique du Sud jusqu’aux États-Unis. Il a demandé au président américain de demander l’avis de ses amis golfeurs sur la question. Qu’il y ait de la violence dans le pays, c’est ce que la délégation a reconnu, et cette violence fait plus de morts chez les Noirs que chez les Blancs et plus en ville qu’en campagne (dans les fermes).
La délégation en a profité pour demander au gouvernement américain des moyens technologiques comme les drones pour lutter contre la criminalité. La réalité en Afrique du Sud est que la minorité blanche qui fait 7 % de la population détient 70 % des terres. Ce qui est une inégalité criante qui est source de violence. La politique du gouvernement est de racheter les terres plus chères que le prix du marché pour les redistribuer à ceux qui n’en ont pas. Il n’y a pas d’expropriation.
Le président américain Donald Trump déroule son programme électoral de Make America great again par des coupes budgétaires et des tarifs douaniers prohibitifs qui touchent la première puissance économique du continent, l’Afrique du Sud, membre du G20 et qui doit accueillir la prochaine réunion des États les plus puissants de la planète ? L’Afrique du Sud voit un certain nombre de programmes de soutien des États-Unis dont elle bénéficiait qui sont supprimés par le nouveau président et son gouvernement.
Des programmes comme l’AGOA dont l’Afrique du Sud bénéficiait par les exportations de son industrie automobile. Il était l’un des rares à tirer quelque chose de substantiel de ce programme alors que les autres pays restaient dans des produits artisanaux. Au moins 40 % des produits d’Afrique du Sud étaient exportés aux États-Unis sans droits de douane. Le président sud-africain est venu aux États-Unis pour sauver les emplois de l’industrie automobile de son pays.
Mais les préoccupations des Sud-Africains n’étaient pas le sujet de cette entrevue, qui avait pour but de contenter la frange radicale de l’électorat de Donald Trump : les racistes et suprémacistes blancs qui font courir cette légende du génocide des Blancs en Afrique du Sud.
Sana Guy
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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