Le Premier ministre a, au nom du président du Faso, ouvert dans la matinée de ce mardi 29 juillet 2025 à Ouagadougou le colloque international marquant le 25ᵉ anniversaire du Conseil constitutionnel, placé sur le thème : « Deux décennies de fonctionnement du Conseil constitutionnel : contribution à la construction de l’État de droit et perspectives ». Ce cadre de réflexions va mobiliser, du 29 au 31 juillet 2025, aux côtés des participants burkinabè, des délégations et participants venus du Bénin, de la Côte d’Ivoire, de Madagascar, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo.
Né de l’éclatement de la Cour suprême, le Conseil constitutionnel a véritablement pris forme le 27 avril 2000, avec l’adoption de la loi organique y relative. Les premiers juges ont prêté serment le 9 décembre 2002. Après deux décennies de fonctionnement, il est apparu important de jeter un regard rétrospectif et d’envisager les perspectives.
Pour le président du Faso, capitaine Ibrahim Traoré, représenté par le Premier ministre, Jean Emmanuel Ouédraogo, cette célébration doit être l’occasion d’engager les réflexions profondes pour l’amélioration des missions du Conseil constitutionnel, dans le sens de sa contribution à la protection des droits des populations, à la construction et la consolidation du modèle de démocratie que le peuple aura choisi, dans le contexte actuel d’affirmation et de défense de la souveraineté nationale.
« La période de transition actuelle offre une opportunité historique de repenser fondamentalement l’orientation constitutionnelle de notre pays, en cohérence avec les aspirations de souveraineté et les valeurs endogènes. Il y a lieu de sortir la constitution du cercle de quelques personnes éclairées pour s’orienter vers la masse populaire, dans une volonté manifeste de rupture avec le mimétisme constitutionnel hérité de la période coloniale. Notre pays a amorcé depuis quelque temps un nouveau virage dans son histoire politique et affirme de plus en plus son indépendance, sa souveraineté. Il entend poursuivre une telle dynamique dans tous les secteurs de la vie sociale, politique et économique, aux côtés d’autres pays frères comme le Mali et le Niger, avec lesquels il a créé l’Alliance des États du Sahel », oriente le président du Faso, ajoutant que l’institution judiciaire dans toute sa globalité n’échappe pas à cette nouvelle dynamique.

De l’avis du chef d’État, il est temps que les juridictions ou institutions constitutionnelles en Afrique engagent des réflexions profondes pour redéfinir leur rôle dans la dynamique actuelle de la quête d’une identité africaine, dans tous les domaines de la vie politique et de la gouvernance.
« Il est temps de repenser le rôle des juridictions et institutions constitutionnelles en Afrique, pour les adapter à nos réalités socioculturelles, à l’évolution de notre histoire et aux aspirations de nos populations, afin qu’elles participent mieux à l’émergence de modèles de gouvernance propres à nos États », exhorte le capitaine Ibrahim Traoré, patron du colloque, à travers son discours prononcé par le Premier ministre.
Le représentant-résident par intérim du PNUD au Burkina, Eloi Kouadio IV, salue l’initiative du Conseil constitutionnel de mettre à profit cette opportunité, pour regarder le chemin parcouru, offrir un cadre de dialogue avec les théoriciens et praticiens du droit, venus d’horizons divers, et lancer une réflexion sur les ajustements à faire, pour répondre aux besoins d’une justice constitutionnelle, dans un monde en mutation.

« Je me réjouis d’apprendre que les conclusions provisoires de l’étude des décisions et avis du juge constitutionnel burkinabè, rendus depuis la mise en place du Conseil constitutionnel, seront également partagées. Ce qui, en définitive, permettra au présent colloque de disposer de données et informations factuelles, pour répondre à la question suivante : la création d’une juridiction constitutionnelle chargée spécialement de la matière constitutionnelle et électorale, et détachée de l’organisation judiciaire classique, a-t-elle marqué une évolution qualitative et quantitative ? C’est donc pour un intérêt évident et de grande importance pour le Burkina Faso que le PNUD a répondu favorablement à la double demande du Conseil constitutionnel. Notre rôle a consisté en effet, d’une part, à l’accompagner et à lui apporter un appui technique et financier dans l’organisation du présent colloque. D’autre part, nous avons soutenu l’élaboration du recueil commenté et annoté de la jurisprudence du Conseil constitutionnel burkinabè depuis sa création. Au-delà de son exploitation durant le présent colloque, ce recueil restera accessible aux praticiens du droit, aux enseignants-chercheurs, aux chercheurs, aux étudiants et au grand public. Ces activités ont été financées dans le cadre de l’initiative lancée par notre siège et dénommée « Building Résilient Democratic Institutions and Processes », c’est-à-dire construire des institutions et des processus démocratiques résilients, entretenue par des contributions reçues du Danemark, du Luxembourg et de la République de Corée », a déroulé Eloi Kouadio IV.
Il a rassuré de la poursuite de l’engagement continu du PNUD aux côtés du gouvernement, pour soutenir les initiatives de réformes visant la promotion de la gouvernance démocratique et inclusive ; le renforcement de la cohésion sociale et celles qui promeuvent la confiance des citoyens envers les institutions et leurs dirigeants, créant ainsi les conditions propices pour la réalisation des ambitions légitimes du peuple burkinabè.
Selon son président, Me Barthélémy Kéré, le Conseil constitutionnel a, en 22 ans de fonctionnement effectif, connu des fortunes diverses. Souvent sollicité, apprécié avec prudence, critiqué régulièrement (et même sévèrement) par les spécialistes, incompris parfois, le Conseil constitutionnel a toujours été au cœur de la vie de la nation burkinabè, témoin, acteur, arbitre, conseiller et même artisan des grands événements politiques, sociaux, sociétaux et juridiques du pays.
« De mars 2003 à juillet 2025, ce sont plus de 800 décisions et avis qu’il a rendus, constituant ainsi une belle et consistante œuvre jurisprudentielle qui est à la fois l’expression de sa contribution à la construction et à la consolidation de l’État de droit, et le témoin de la grande histoire, mais aussi des petites histoires de la singularité de notre nation, dans le façonnement de son destin », a présenté Me Barthélémy Kéré, affirmant qu’en deux décennies, le Conseil constitutionnel a toujours visé à maintenir le respect du contrat social, la constitution.
« C’est aussi et surtout un Conseil constitutionnel qui, en temps de paix comme en temps de crises, ne s’est pas dérobé à sa charge de réguler le fonctionnement des institutions et des pouvoirs publics. Dans ce sens, il est allé jusqu’à s’auto-saisir à l’issue de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, d’où avait résulté un vide constitutionnel ; le Conseil constitutionnel, constatant alors une vacance de pouvoir, avait invité les forces vives de la nation à désigner, de manière consensuelle, un président de la transition dont il a reçu le serment. De même, lors des élections de 2020, le Conseil constitutionnel, en raison de la situation sécuritaire de l’époque, a constaté une situation de force majeure et tiré les conséquences juridiques exigées, pour mener le processus électoral à son terme. En 2022, c’est encore un Conseil constitutionnel, déterminé à garantir la survie et la stabilité de l’État, qui a pourvu aux vides institutionnels », retrace le président du Conseil constitutionnel, pour qui, en autant de temps, l’institution a engrangé une belle expérience et laissé une œuvre constitutionnelle méritant d’être évaluée, critiquée, capitalisée et renforcée pour, notamment, relever les défis de la nation.
Ce colloque, organisé par le Conseil constitutionnel, en partenariat avec le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l’Institut d’études sur l’administration, les libertés et l’État ainsi que le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD), bénéficie du soutien de la Loterie nationale burkinabè (LONAB), de la Société nationale burkinabè d’hydrocarbures (SONABHY) et de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS).
O.L
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
Commentaires récents