Des centaines de manifestants ont pris d’assaut les artères de la ville de Bobo-Dioulasso, ce jeudi 29 septembre 2022, pour exiger la démission du président du Faso, Paul-Henri Damiba, pour, disent-ils, son incompétence dans la gestion de la crise sécuritaire. Cette manifestation spontanée fait suite à la récente attaque d’un convoi de ravitaillement à Gaskindé et qui a causé d’énormes pertes en vies humaines, des blessés et d’importants dégâts matériels.
Des bobolais sont descendus par centaines au centre-ville de Bobo-Dioulasso. Au son des sifflets et des vuvuzelas, ils reprenaient en chœur des slogans comme : « Damiba dégage ! Damiba démission ! ». Cette injonction, adressée au président du Faso Damiba, a été formulée à l’initiative d’une coalition de mouvements de la ville de Bobo-Dioulasso dont les membres sont majoritairement des commerçants. Les manifestants reprochent ainsi au président Damiba, une « gestion chaotique » de la situation sécuritaire du Burkina Faso qui, selon eux, « menace de précipiter le pays dans l’impasse ».
Ces manifestants, pour rendre ainsi hommage à leurs frères tombés à Gaskindé et particulièrement à leurs collègues commerçants, ont décrété cette journée du jeudi 29 septembre 2022 journée « ville morte ». C’est ainsi que certains ont décidé de la fermeture du grand marché de Bobo-Dioulasso et de quelques magasins aux alentours. C’est une mobilisation qui a commencé timidement vers 8 heures pour ensuite connaître une grande affluence quelques heures plus tard aux alentours du marché central de Bobo-Dioulasso. Les manifestants, qui avaient initialement prévu de se rassembler à la place Tiéfo Amoro, vont finalement se retrouver à l’entrée du grand marché car cette place était déjà prise d’assaut par les forces de l’ordre très tôt dans la matinée.
- Des bobolais marchent pour demander la démission du président Damiba
En effet, toutes les voies menant à la place Tiéfo Amoro ont été barricadées ce matin, rendant difficile son accès. Lorsque nous arrivions sur les lieux, impossible d’arriver à cette place sans motif valable. Les forces de l’ordre étaient déjà positionnées dans tous les quatre coins et d’autres étaient en patrouille dans les artères de la ville.
Déterminés à se faire entendre, les manifestants ont donc décidé de se réunir devant le marché central, afin d’exprimer leur ras-le-bol par rapport à la gestion de la crise sécuritaire au Burkina Faso. Pour eux « la situation sécuritaire est chaotique à cause de l’incompétence du président Damiba ». C’est pourquoi, disent-ils, « il doit démissionner pour avoir échoué à apporter des réponses satisfaisantes aux multiples attaques qui endeuillent le Burkina Faso ».
Selon Salif Nikièma de la Ligue des patriotes, l’un des cerveaux de la marche, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase est l’attaque de Gaskindé qui a endeuillé une fois de plus le peuple burkinabè. « Cette manifestation est en lien avec le massacre qui a eu lieu à Gaskindé où le gouvernement peinait à faire le bilan de ce qui s’est passé. Nous estimons que la vie de chaque Burkinabè compte car nous avons constaté que la vie du Burkinabè est en train d’être banalisée au point où le gouvernement veut étouffer cette affaire en apportant des choses qui sont en contradiction avec ce qui s’est passé. Ils disent que l’armée monte en puissance et nous disons que ce n’est pas le cas (…). La ville de Bobo-Dioulasso risque de connaître le même sort si rien n’est fait parce que les terroristes sont en train d’encercler la ville », prévient-il ; avant d’indiquer que cette marche est une manière pour eux d’exprimer leur solidarité à toutes les victimes de cette attaque et en particulier aux commerçants. Une manière selon lui, d’inviter également le gouvernement à plus d’action sur le terrain.
- Salif Nikièma de la Ligue des patriotes
Par ailleurs, il ne manque pas d’inviter le président Paul-Henri Damiba à prendre exemple sur le président malien, au cas où il n’aurait pas de solutions miraculeuses pour sortir le pays de cette crise car, dit-il, « le bon exemple ça se copie. Mais nous avons constaté que la situation dépasse Damiba et son MPSR. Donc il est nécessaire, pour le bonheur de tous et pour son bien également, de rendre sa démission et de retourner dans les casernes », a suggéré Salif Nikièma de la Ligue des patriotes.
Embouchant la même trompette, Adama Sawadogo, employé de commerce au marché central de Bobo-Dioulasso, n’ira pas par quatre chemins pour exprimer sa déception du régime MPSR. Il assure pourtant avoir applaudit le coup d’Etat du 24 janvier. Décision qu’il regrette amèrement.
Selon lui, « après le régime MPP, les massacres continuent toujours. L’avènement du MPSR n’a pas permis de renverser cette tendance. Bien au contraire, les attaques se sont multipliées et plus de la moitié du territoire national est désormais sous contrôle des groupes terroristes. Et c’est dans ce contexte marqué par l’incompétence du MPSR que nous avons décidé de prendre notre destin en main », a-t-il laissé entendre.
« Nous avions dit que le putsch était salvateur. Triste est de constater ce qui se passe aujourd’hui avec Damiba. Il a changé sa tenue militaire en tenue d’homme politicien afin de restaurer l’ancien régime. C’est pourquoi nous disons qu’il n’est pas l’homme qui pourra amener le navire burkinabè à bon port et c’est mieux qu’il démissionne », a lancé Adama Sawadogo.
- Des manifestants dispersés à coup de fouets
Des manifestants réclament le départ de l’armée française
Des manifestants ont également donné de la voix contre la présence de militaires français au Burkina Faso. Pour Issouf Ouédraogo, les Français ne jouent pas franc jeu dans cette lutte contre le terrorisme. C’est pourquoi il demande le départ de l’armée française du territoire burkinabè. « Si nous sommes sortis aujourd’hui, c’est au regard de la situation du pays. Nous avons applaudi Damiba lorsqu’il est venu au pouvoir et aujourd’hui c’est la déception. Nous lui demandons d’écouter son peuple et de cesser toutes coopérations avec la France, de s’unir à la Russie dans le cadre de la lutte contre le terrorisme », a-t-il souhaité.
- Issouf Ouédraogo demande le départ de l’armée française du territoire burkinabè
Des manifestants fouettés par un groupe de « jeunes pro-MPSR »
De l’entrée « koko donda » du marché central, les manifestants ont pris d’assaut les artères du centre-ville pour une parade à moto, toujours en scandant la démission du président Damiba. Très vite, ils seront contraints, certains par les forces de l’ordre et d’autres par des « jeunes pro-MPSR », d’abandonner leur manifestation. En effet, un groupe de jeunes, armés de fouets, s’en est pris aux manifestants aux alentours du grand marché, pour, disent-ils, trouble à l’ordre public. Selon certains fouettards, « cette marche n’est pas dans l’intérêt de Bobo-Dioulasso » et ils appellent les Burkinabè à soutenir la transition dans cette lutte contre les terroristes. [ Cliquez ici pour lire l’intégralité ]
Romuald Dofini
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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