Le Plan national de développement économique et social (PNDES), la deuxième loi de finances rectificative, la loi de facilitation de passation des marchés publics : ce sont les points essentiels abordés par le premier ministre Paul Kaba Thiéba, lors de ce 9ème point de presse de son gouvernement. Pour ce rendez-vous du jeudi 4 août 2016, le premier ministre était face à la presse avec le porte-parole du gouvernement, Rémis Fulgance Dandjinou.

« Je ne suis pas un magicien », a indiqué le premier ministre, faisant référence à la situation économique du pays. Paul Kaba Thiéba ne possède pas de baguette magique, mais il croit au nouveau référentiel de politique économique du Burkina, dont l’objectif est de : « transformer structurellement l’économie burkinabè, pour une croissance forte, résiliente, inclusive et créatrice d’emplois décents pour tous et induisant l’amélioration du bien-être ».

Du PNDES : il est attendu au moins 50 000 emplois par an, la baisse de l’incidence de la pauvreté de 40% en 2014 à moins de 35% en 2020, la réalisation d’une croissance économique moyenne de 8%. Financé par les ressources propres de l’Etat à hauteur de 6 3,8%, le coût global de la mise en œuvre du programme s’élèverait à environ 15 000 milliards de francs CFA sur la période 2016-2020. La part consacrée aux dépenses d’investissements est de 54 ,6%, soit une enveloppe globale de 8408 ,2 milliards de francs CFA pour les 5années. Le besoin en financements s’élève à 5570 ,2 milliards de francs CFA. A ce propos, une table ronde est prévue d’ici la fin de l’année 2016 avec les partenaires techniques et financiers.

Pour le Premier ministre, le montant des investissements du PNDES est bien réaliste. « Nous avons fait des simulations financières, c’est tout à fait soutenable » a-t-il signifié. Ainsi, l’Etat burkinabè compte d’abord sur ses ressources propres. Ensuite, la contribution des partenaires techniques et financiers sous formesvariées, « nous verrons si les conditionssont conformes à nos intérêts et à la soutenabilité de la dette publique avant qu’on s’engage » et enfin, les emprunts sur le marché. Et Paul KabaThiéba de préciser : « Le président du Faso est clair, si on va sur le marché pour emprunter, c’est pour investir et non pour consommer .Il n’est pas question d’emprunter pour venir payer des salaires ou des indemnités. C’est pour investir pour les générations futures ».

Une mise en œuvre réussie du PNDES sous-entend une mobilisation des ressources financières au plan national. « Nous sommes parmi les derniers en termes de recettes fiscales. La norme de l’UEMOA est de 20% et nous sommes à 14, 4 % .Cela veut dire que les burkinabè ne payent pas l’impôt. Nous allons faire des efforts. Nous avons demandé aux régies financières d’augmenter les recettes fiscales pour avoir plus de maîtrise sur le financement du PNDES » a noté Paul PaulKabaThiéba. C’est dans cet optique que s’inscrit l’adoption de la deuxième loi de finances rectificative, afin d’élargir l’assiette fiscale.

Institution de nouvelles taxes

Evoquant le sujet, le premier ministre est revenu surles taxes relatives aux propriétés bâties et non bâties, les boissons, spécifiquement la bière, la retenue à la source sur les jeux de hasard et la taxe sur les véhicules d’importation d’une certaine catégorie.

La taxe sur les propriétés bâties et non bâties pourrait rapporter plus d’1 ,5 milliards de francs CFA par an au budget de l’Etat, selon Paul KabaThiéba. Aux dires du premier ministre,il y a beaucoup de propriétés bâties et non bâties qui sont loties et sur lesquels, l’Etat ne perçoit rien. L’Etat aura donc un potentiel de ressources à tirer des taxes foncières. « Ceux qui vivent dans les villages, les communes rurales où il n’y pas de lotissement, ils ne seront pas assujettis. Dans les communes rurales, lorsque les maisons ont fait l’objet de lotissement clair avec des titres fonciers, là, ce sont des maisons bien identifiées qui appartiennent à des personnes précises .Si ce sont des maisons à usage d’habitation principale, la personne ne sera pas assujettie. Si c’est un terrain qui est identifié et qui n’est pas habité, le propriétaire sera assujetti » a-t-il expliqué.

La Contribution foncière va-t-elle avoir une incidence sur le coût du loyer ? A ce sujet, le premier ministre précise que des dispositions seront prises pour éviter que la mise enœuvre de la loi ne se traduise par une augmentation du loyer.

Concernant le relèvement du taux de taxation de la bière (de 25% à 30%°), cette mesure devra permettre d’engranger 3 milliards de francs CFA. L’institution d’une retenue à la source sur les gains des paris et autres jeux de hasard (cartes à gratter, machines à sous, etc.), en l’occurrence une retenue de 10%, va permettre d’accroître les recettes fiscales de plus de 2 milliards de francs CFA. Cette mesure ne concerne pas les gains du Pari mutuel urbain (PMU-B), les gains étant déjà soumis à cette retenue sur la masse à partager. Quant à la taxe sur l’importation des véhicules de tourisme dont la puissance est égale ou supérieure à 13 chevaux, elle va accroître les recettes annuelles de plus de deux milliards de francs CFA.

La facilitation de passation des marchés publics

Adopté lors du conseil des ministres du mercredi 3 aout 2016, le décret d’application de la loi de facilitation de passation des marchés publics permet un « aménagement de mise en concurrence des soumissionnaires à travers des allègements des conditions de mise en œuvre des procédures ». Cette loi devra permettre entre autres : l’assouplissement des conditions d’approbation des contrats, le relèvement du seuil de passation de 0 à moins de 10 millions (au lieu de 5 millions ».

Les nouvelles dispositions, pour une période de 6 mois, concernent les secteurs d’activités tels que les infrastructures, l’éducation nationale, la santé, l’enseignement supérieur etc.

L’Affaire « appel Roch-Blaise »

En réaction à une question relative à l’appel téléphonique entre le chef de l’Etat, Roch Kaboré et l’ancien président, Blaise Compaoré, un sujet qui alimente bien les débats, le premier ministre est catégorique : « J’étais presqu’avec le président à tout moment. Jamais, jamais, je n’ai vu, entendu un entretien avec qui que ce soit. On n’a jamais senti l’absence de quelqu’un. Malheureusement, nous avons dans la presse, certaines personnes qui lancent des commentaires sans vérifier. Ça ne correspond à aucune réalité. Je démens formellement, ni de près, ni de loin, il y a jamais eu d’approche ». Dans cette dynamique, le premier ministre soutient que la mission en Côte d’ivoire s’inscrit dans le cadre des intérêts communs. « Nous ne sommes pas allés à Abidjan pour demander un soutien financier. Nous ne sommes pas allés demander de l’argent à quelqu‘un, je le précise » a dit Paul Kaba Thiéba.

La perte des 25 millions lors de la mission à Taïwan

En réponse à une question concernant un probable remboursement de l’argent perdu, le premier ministre s’explique : « lorsque je me déplace avec une délégation, moi, je ne touche pas l’argent. Je ne vois même pas l’argent. En général, c’est soit un agent financier qui nous accompagne ou une personnalité qui m’accompagne, qui prend de l’argent cash. Dans mon cas, c’était mon aide de camp. On se déplace avec du cash parce que, lorsque l’autorité se déplace, l’autorité a des dépenses de souveraineté, notamment, à chaque fois que je me déplace dans un pays, j’en profite toujours pour rencontrer nos compatriotes qui vivent dans ce pays. Cela donne toujours lieu à des cocktails, Ça sert également à financer les frais d’hôtellerie et de restauration ».

A ce titre, le premier ministre souligne qu’il faut prendre en compte deux éléments. Il s’agit d’une réglementation de l’UEMOA qui ne permet pas au Trésor national de disposer d’un compte à l’étranger et d’une limite de l’argent cash « fixé à 2 millions. Il n’est pas possible de sortir des 8 pays de l’UEMOA avec des espèces qui dépassent 2 millions, même sous forme de carte, mais il y a une tolérance pour les délégations officielles. ».

Et le premier ministre de poursuivre : « Ce décaissement est encadré par des règles. Quiconque va prendre de l’argent au trésor pour accompagner une autorité en mission, retenez que sa responsabilité pécuniaire personnelle est engagée. S’il manque un centime, vous devez rembourser, c’est ça que le règlement dit. Si on applique les règles, c’est mon aide de camp qui doit payer, ce n’est pas le premier ministre, parce que le premier ministre ne voit pas l’argent. Je n’ai rien perdu du tout, je voyage les poches vides. Maintenant, nous sommes en train de prendre des dispositions pour voir comment recouvrer cette somme conformément à la loi » a-t-il confié.

« J’ai une parcelle à Ouaga »

Réagissant à une question sur ses investissements au Burkina, Paul Kaba Thiéba répond : Je suis burkinabè à 150%. Je pars au village depuis ma tendre enfance. J’ai cultivé dans les champs comme tous les enfants. J’ai toujours été attaché au Burkina. J’ai un terrain à Ouaga que je suis en train de mettre en valeur progressivement, en fonction de mes moyens. Seulement, dans la déclaration de biens, il y a eu une erreur. Comme la maison n’est pas achevée, ils l’ont classée dans les pâturages. A Tougan, j’ai hérité d’une maison de mon père qui est totalement délabrée, je n’ai pas encore les moyens de la mettre en œuvre ».

A la veille de fête de l’indépendance du Burkina, le premier ministre a tenu à présenter ses félicitations à tous les burkinabè vivant sur le territoire national ou à l’étranger. « Ce 56e anniversaire revêt une importance particulière car il intervient à la suite d’une période mouvementée de notre histoire » a-t-il indiqué.

Nicole Ouédraogo

Lefaso.net

Source: LeFaso.net