Les commerçants des marchés de Colma et d’Accart-Ville de Bobo-Dioulasso ont tenu, ce jeudi 2 octobre 2025, une conférence de presse sur le site de construction du marché de Colma. Face aux journalistes, ils ont exprimé leur colère et leur inquiétude quant à l’avenir de ces deux infrastructures commerciales, dont la reconstruction tarde à se concrétiser après quatre années d’attente. Entre promesses non tenues, retards répétés, coûts jugés exorbitants et attributions controversées des boutiques, les acteurs dénoncent une situation devenue intenable.
La reconstruction des marchés de Colma et d’Accart-ville devait symboliser un pas en avant vers la modernisation du commerce à Bobo-Dioulasso. Mais au lieu de susciter l’adhésion, le projet est depuis longtemps source de méfiance, de divisions et de contestations. Pour les commerçants, il ne s’agit pas seulement d’une question de boutiques, mais aussi d’une lutte pour la survie économique de milliers de familles qui, depuis quatre ans, peinent à se réinstaller convenablement.
Cette conférence de presse se tient au moment où l’on croyait que les différents acteurs avaient fumé le calumet de la paix. En effet, en juin dernier, le président de la délégation spéciale de l’arrondissement 2 de Bobo-Dioulasso (dont relèvent les deux marchés), Sigaro Siegfried Sanou, avait affirmé sa volonté de relancer les travaux de construction des marchés de Colma et d’Accart-ville. Il l’avait fait savoir au cours d’une conférence de presse tenue le 10 juin 2025. Au cours de cette rencontre, il avait dévoilé un paquet de solutions pour aboutir à la bonne réalisation de ces différents marchés.
Malgré ces nombreuses tentatives, les commerçants desdits marchés semblent ne pas avoir eu gain de cause. D’où leur cri de cœur ce jeudi 2 octobre. Selon les conférenciers, l’histoire de ce dossier remonte à 2021, année où les marchés de Colma et d’Accart-Ville ont été démolis pour laisser place à des projets d’infrastructures modernes. La mairie avait alors annoncé un délai de 18 mois pour la reconstruction. Une promesse qui avait suscité l’enthousiasme des usagers, convaincus que leurs lieux d’activité allaient être modernisés et adaptés aux réalités du commerce actuel.
Selon eux, quatre ans plus tard, le constat est tout autre. « Après les 18 mois, rien n’était fait. Ensuite, la mairie a pris une nouvelle décision d’ajouter 18 mois supplémentaires, toujours sans nous consulter. Ce délai aussi est expiré, et nous ne voyons toujours pas de marché digne de ce nom », ont déploré les commerçants au cours de la conférence.

Des « kiosques » à la place d’un marché moderne
L’une des principales frustrations exprimées par les conférenciers concerne l’architecture du projet. Alors qu’ils s’attendaient à un marché moderne, fonctionnel et bien structuré, ils affirment constater sur le terrain « une construction qui ressemble plus à des kiosques qu’à un véritable marché moderne ». « On nous avait promis une grande infrastructure moderne. Aujourd’hui, ce que nous voyons ressemble à des alignements de petites boutiques précaires. Ce n’est pas ce qui avait été prévu au départ », martèle leur porte-parole Drissa Konaté.
À en croire les conférenciers, outre le retard et le changement de plan, les prix des hangars suscitent également de vives contestations. Le coût le plus bas avoisinerait un million de francs CFA, une somme jugée inaccessible pour la grande majorité des commerçants autochtones. « Nous sommes de petits commerçants qui vivons au jour le jour. Comment peut-on nous demander de payer près d’un million pour un simple hangar ? C’est impossible ! », s’est indigné une commerçante du marché de Colma.
Pour eux, « ces prix exorbitants » risquent d’exclure les véritables acteurs locaux au profit de commerçants plus fortunés venus d’ailleurs, ou de particuliers qui n’ont jamais exercé dans ces marchés. Par ailleurs, la question de l’attribution des boutiques et hangars a également occupé une grande place dans les échanges. Les commerçants affirment que la transparence n’est pas respectée dans la gestion des places disponibles.
« Au départ, nous pensions que les commerçants autochtones seraient prioritaires. Mais à notre grande surprise, des particuliers, qui n’ont jamais eu de boutiques dans ces marchés, se sont accaparé des places avec la complicité de l’entreprise en charge des travaux », ont-ils dénoncé. Selon eux, certaines boutiques auraient été attribuées à des personnes étrangères aux marchés de Colma et d’Accart-ville, une situation jugée injuste et inacceptable.
Un appel à la transparence et à la responsabilité des autorités
Face à ces « irrégularités », les commerçants interpellent l’arrondissement 2, notamment la délégation spéciale, afin qu’elle prenne ses responsabilités et garantisse une gestion équitable de ces infrastructures. « Nous demandons plus de transparence dans la gestion de ces deux marchés. Les commerçants ont assez souffert. Nous appelons aussi les plus hautes autorités du pays à s’impliquer pour que justice soit faite », ont-ils lancé.

Les commerçants ne comptent pas en rester là. À travers leur plateforme de communication, ils ont annoncé donner un délai de 15 jours aux autorités compétentes pour répondre favorablement à leurs revendications. « Si toutefois notre message n’est pas entendu, nous reprendrons notre place au sein du marché pour exercer nos activités quotidiennes. Nous ne pouvons plus rester inactifs pendant que nos familles souffrent », ont-ils averti.
En attendant la réaction des autorités de l’arrondissement 2 (contactées au téléphone), l’avenir des marchés de Colma et d’Accart-ville « reste suspendu à un fil ».
Romuald Dofini
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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