
Après trois jours d’intenses échanges, les travaux de l’atelier de rencontre de l’Association des leaders traditionnels, coutumiers et religieux du Liptako-Gourma ont pris fin ce jeudi 23 octobre à Ouagadougou. La rencontre s’est clôturée par une conférence de presse au cours de laquelle les participants ont réaffirmé leur engagement à œuvrer pour la stabilité, la cohésion sociale et la résilience des communautés dans la région du Liptako-Gourma.
Placée sous le thème « Comment contribuer à la gouvernance locale et à la coopération transfrontalière pour la stabilisation de la région du Liptako-Gourma », cette rencontre a réuni pendant 72 heures des autorités coutumières, traditionnelles et religieuses venues du Burkina Faso, du Mali et du Niger.
Les discussions ont permis de dégager plusieurs recommandations fortes à l’endroit des autorités de l’Alliance des États du Sahel (AES). Les participants ont notamment appelé à renforcer les mécanismes traditionnels de gestion des conflits, tels que la parenté et l’alliance à plaisanterie, les médiations coutumières et les arbres à palabres, afin de consolider la cohésion sociale et prévenir les tensions intercommunautaires. Ils ont également insisté sur la promotion des valeurs culturelles et religieuses comme leviers de prévention de l’extrémisme violent. À ce titre, les leaders ont recommandé le développement d’argumentaires structurés fondés sur la foi et la sagesse communautaire pour déconstruire les discours haineux et les idéologies violentes.
Convaincus que la stabilité durable du Liptako-Gourma passe par l’implication des populations, les chefs coutumiers et religieux ont plaidé pour la mise en place de mécanismes communautaires de solidarité afin de faire des habitants des alliés dans la lutte contre le terrorisme et l’exclusion.
Réaffirmant leur rôle de médiateurs et de bâtisseurs de paix, les membres de l’association se sont engagés à « penser, parler et agir d’une seule voix » pour la restauration du vivre-ensemble et la promotion d’une gouvernance locale inclusive. Ils entendent ainsi soutenir les stratégies nationales et régionales des États membres de l’AES en matière de paix, de sécurité et de développement.
« Nous avons compris que la stabilité du Liptako-Gourma ne dépend pas seulement des armes ou des frontières, mais avant tout de la confiance entre les communautés, de la justice dans nos villages et de la solidarité dans nos cœurs. Nos traditions, notre foi et nos valeurs ancestrales demeurent des piliers de paix et de gouvernance. Là où l’administration ne peut pas toujours être présente, la chefferie traditionnelle reste le premier recours, la voix de la sagesse, la maison de la médiation. C’est pourquoi nous devons revaloriser ces institutions endogènes dans les politiques publiques et les programmes de stabilisation. Nous avons aussi réaffirmé l’importance du dialogue intergénérationnel et interculturel. Dans un contexte où les incompréhensions sont parfois exploitées pour diviser, il nous revient de rappeler que la religion élève l’âme, la culture forge l’identité. Lorsque la religion oublie la culture, elle perd son ancrage ; lorsque la culture oublie la foi, elle perd sa profondeur et son sens. Une foi détachée de la culture devient étrangère à ses enfants, une culture oubliant la foi devient un corps sans âme », a laissé entendre le président de l’association des leaders traditionnels coutumiers et religieux, Émir du Liptako-Gourma, Ousmane Amirou Dicko.
Le président de l’association a notifié à l’assistance que cette rencontre ne doit pas rester un simple souvenir. Mais elle doit devenir le point de départ d’une coordination permanente entre les chefferies et les communautés, pour prévenir les conflits, orienter la jeunesse et restaurer le vivre-ensemble.

« Que cette rencontre soit un symbole d’unité et d’espérance. La paix est un chemin d’espérance fait de dialogue et de réconciliation. Pour avoir la paix, il faut la compréhension entre les communautés. Les régimes passent, mais les communautés restent. Donc il faut s’attendre à ce que des différences subsistent encore longtemps, tant d’une communauté à l’autre qu’à l’intérieur d’une même communauté. Notre rôle n’est pas d’effacer ces différences, mais de nous aider à mieux les accepter dans le respect mutuel et sans chercher à nous détruire. Nous sommes tous les gardiens et protecteurs de la paix, et celle-ci repose sur le concours de chacun de nous, en tant que chefs coutumiers et religieux, en tant que parents, éducateurs, acteurs ou détenteurs d’une influence, aussi minime soit-elle, sur le cours des choses dans notre famille, dans notre concession, dans notre quartier, dans notre milieu de travail et dans notre pays », a-t-il souligné.
Présents à l’ouverture de la cérémonie d’ouverture le 21 octobre dernier, le représentant du ministre en charge de l’administration territoriale Idrissa Savadogo a rappelé aux autorités coutumières et religieuses leur rôle primordial dans le processus du retour de la paix. « L’institution d’une rencontre annuelle des leaders traditionnels, coutumiers et religieux dans les trois pays par l’ALG ne peut que renforcer leurs rôles dans la sécurisation des communautés au Mali, au Niger et au Burkina Faso. Ce cadre de dialogue et de partage d’expérience, créé par l’Autorité de développement intégré des États du Liptako-Gourma, est un cadre de réflexion et aussi une opportunité qui vise à promouvoir des solutions endogènes à la résolution des crises et conflits sociaux en lieu et place de solutions importées souvent inadaptées puisqu’éloignées de nos réalités. Cette rencontre sera une occasion pour que vous vous engagiez davantage dans le renforcement de la gouvernance locale et de la coopération transfrontalière afin que notre espace commun soit pacifié davantage », dit le représentant du ministre aux leaders traditionnels coutumiers et religieux. Il a terminé en remerciant l’Autorité de développement intégré des États du Liptako-Gourma qui a organisé cette rencontre qui permettra de trouver des solutions endogènes aux conflits et au terrorisme dans la zone du Sahel.
Rama Diallo
Lefaso.net
Source: LeFaso.net

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