Partenariat public-privé (PPP). Juste trois mots qui font beaucoup parler, surtout depuis le début du mois de juillet 2017. Le gouvernement avance ses raisons, l’opposition exprime ses réserves, son refus ; certains de ses députés ont même quitté l’hémicycle le 3 juillet 2017 quand la loi était votée, en signe de protestation. Même si la loi est déjà adoptée, le Balai Citoyen continue de porter le débat. Ce 28 juillet à Ouagadougou, un panel a permis d’enseigner le contenu de cette nouvelle loi et ses implications au public.

Le partenariat Public-Privé (PPP) : La réforme du 3 juillet en question. Implications, défis et responsabilité de la société civile dans la gouvernance. C’était le thème du panel. Me Guy Hervé Kam, porte-parole du Balai Citoyen et le Pr Idrissa Ouédraogo, enseignant au département Science économique et gestion de l’Université Ouaga 2 ont donné le ton.

Le premier communicateur a noté que pour assurer ses différentes missions, l’Etat passe par la commande publique. Et le Partenariat Public-Privé qui est une forme de collaboration entre l’Etat, ses démembrements et le privé, en vue d’acquérir des biens et des services, est une des modalités de la commande publique.

Pour Me Kam, il y a donc une idée de collaboration dans le PPP et c’est le partenaire privé qui assure la responsabilité (financement). Dans cette démarche, il y a également l’idée de partage des risques (soit tout le monde gagne, soit tout le monde perd).


Revenant sur la réforme de la loi du 3 juillet, le conférencier a précisé que l’Etat a ciblé un certain nombre de projets dont la réalisation passera par l’entente directe. Une procédure qu’il pourra utiliser pendant six mois. Cependant, la concurrence, l’égalité, l’objectivité des procédures, la transparence sont des éléments de la bonne gouvernance qui risquent d’être foulés au pied à travers cette méthode, a regretté le porte-parole du Balai Citoyen. Le citoyen ne peut véritablement avoir un regard sur la procédure.

En plus, a poursuivi l’avocat, le PPP a été expérimenté de par le passé. Il aurait fallu faire le bilan des projets passés sous ce régime avant d’envisager d’autres.

Une récompense pour les amis politiques ?

La raison avancée par le gouvernement pour l’adoption de ces mesures est la faiblesse du taux d’exécution du budget d’investissement du fait de la lourdeur et de la complexité des contractualisations. Ce faible taux d’exécution (environ 30%) serait de nature à compromettre la mise en œuvre du Plan national de développement économique et social (PNDES).

En tout cas, foi du Pr Idrissa Ouédraogo, le PPP a l’avantage de développer les capacités du privé local.


Seulement, a insisté le Pr, le gré à gré ne sied pas pour résoudre le problème de lenteur posé par le gouvernement. ‘’Ce ne sont pas les procédures le problème”. « On nous dit que l’on fait le gré à gré parce que nous avons un taux d’exécution qui est relativement faible. La raison avancée n’est pas une bonne raison, donc, il faut chercher ailleurs », a poursuivi Pr Idrissa Ouédraogo pour qui il faut plutôt voir les remous sociaux, avec surtout les grèves à répétition des syndicats du trésor et des impôts.

Pour lui, l’esprit de cette loi, c’est d’avoir des conditions restrictives puisque les marchés ne seront pas vraiment ouverts et c’est chaque ministre qui peut faire son gré à gré. Du coup, cela sera profitable seulement aux entreprises qui seront invitées au repas du seigneur. Aucune concurrence entre les entreprises n’est possible, en plus, les PPP sous nos cieux sont mal négociés. Alors que les privés ne sont pas des philanthropes, il faut que l’Etat ait de grandes capacités de négociation des contrats.

Le PPP n’est pas à rejeter systémiquement, a rassuré le paneliste pour qui il a fait ses preuves ailleurs et fonctionne bien, comme au Maroc. Seulement, il faut qu’il soit bien encadré et bien suivi. « « Si l’on applique les marchés de gré à gré, cela ne profitera qu’aux hommes d’affaires qui ont des accointances politiques. J’ai comme l’impression que c’est une ouverture à la corruption et une façon de donner des ressources à des amis politiques », a-t-il conclu.

Tiga Cheick Sawadogo

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Source: LeFaso.net