Si le Burkina peut se réjouir d’avoir organisé dans un climat apaisé, en 2015 et en 2020, les élections nationales (présidentielles et législatives), tel n’a pas été le cas avec les municipales de mai 2016 qui ont été, elles, émaillées de violences avec des pertes en vies humaines. C’est dans le souci d’éviter de telles situations malheureuses pour ces élections locales qui s’annoncent pour 2022, que la Fondation internationale pour les systèmes électoraux (IFES) a tenu ce mercredi 28 avril 2021 à Ouagadougou, en collaboration avec la Convention des organisations de la société civile pour l’observation domestique des élections (CODEL), un atelier de réflexion sur la pratique du suffrage universel direct pour les élections locales.

Repoussées pour 2022, les élections municipales (élections de proximité) représentent un enjeu capital dans la consolidation de la démocratie et le processus de développement. Instruites des dernières en date, celles de 2016 qui ont été caractérisées par des violences jamais vécues en la matière au Burkina, des organisations ont décidé de miser sur des réflexions également autour de la question, dans le but de parvenir à un scrutin apaisé et approprié par les citoyens.

C’est dans cet esprit que s’inscrit cet atelier, organisé par la Fondation internationale pour les systèmes électoraux (IFES), en collaboration avec la Convention des organisations de la société civile pour l’observation domestique des élections (CODEL), pour réfléchir sur la pratique du suffrage universel direct pour les élections locales. En clair, il s’agit d’envisager que les maires et les présidents des Conseils régionaux soient directement élus par les populations concernées.

Dans son rapport sur les élections de novembre 2020, la CODEL a recommandé l’adoption du suffrage universel direct pour la désignation des maires et des présidents des conseils régionaux.

Selon le président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), Newton Ahmed Barry, plusieurs scénarii sont actuellement en étude par rapport à l’option à retenir pour les municipales à venir, avec la probabilité d’aller vers le suffrage universel direct pour la désignation des maires et présidents de conseils régionaux.

En tous les cas, poursuit-il, le mode qui va être retenu doit corriger les écueils de celui en vigueur aujourd’hui (le suffrage universel indirect). En effet, de nombreux conseils municipaux connaissent des difficultés de fonctionnement. Ces difficultés s’expliquent par plusieurs facteurs, dont celui lié au mode de désignation des maires, explique Newton Ahmed Barry.

Newton Ahmed Barry mesure l’apport de ce travail pour son institution, la CENI.

Par cet atelier, il s’est agi pour les initiateurs donc d’approfondir les réflexions aux fins de fournir aux décideurs burkinabè, plusieurs options et facteurs à prendre en compte lors de la révision du Code électoral en perspective. Il vise aussi à stimuler le débat et faire en sorte que tous les angles soient pris en compte dans ce processus de réforme qui doit, à terme, donner aux citoyens un plus grand droit de regard sur la manière dont ils sont gouvernés. Au cours des travaux, les participants ont eu droit à la présentation des résultats d’une étude comparative sur les modes de scrutin pour les élections locales.

« En novembre 2020, le pays a fait un nouveau pas vers la consolidation de la démocratie, en organisation des élections acceptées par tous les partis politiques dans un contexte sécuritaire difficile ainsi qu’une crise de santé publique qui a entraîné des difficultés économiques pour les citoyens, non seulement ici, mais dans le monde entier.

L’IFES travaille principalement avec la CENI dans la dynamique du renforcement et de la professionnalisation de l’administration électorale.

Les élections ont été une démonstration claire de l’engagement à faire en sorte que les citoyens aient leur mot à dire sur deux questions essentielles, à savoir comment ils sont gouvernés et qui les gouverne », a salué le directeur-pays de l’IFES-Burkina, Nicholas Matatu, pour qui le choix du mode de scrutin est une question très importante pour un pays.

Dans la dynamique de la réforme, il s’agit, explique-t-il, de faire en sorte que les discussions soient participatives, inclusives sur ces questions pour que tous les acteurs puissent comprendre les enjeux du choix du mode de scrutin.

C’est pourquoi l’IFES se donne pour mission également de partager les expériences des autres pays afin que le Burkina puisse faire le meilleur choix électoral. « Pour IFES, il n’y a pas de meilleur système électoral, chaque système doit être adapté au contexte du pays et c’est une question souveraine. (…).

Nicholas Matatu, directeur-pays de l’IFES-Burkina

Chaque système a ses avantages et ses inconvénients, sinon, tous les pays utiliseraient le même système électoral. Au contraire, pour être efficaces, les systèmes électoraux doivent répondre aux conditions historiques, sociales et politiques de chaque contexte. (…). Mais nous voulons accompagner tous les acteurs, pour faire en sorte que toute l’information et tous les angles soient examinés pour les aider à prendre des décisions adéquates », précise M. Matatu, saluant l’esprit de consensus qui a régné durant tout le processus de novembre 2020.

L’IFES estime donc que des discussions exhaustives sont nécessaires pour obtenir les meilleurs résultats possibles. « Notre expérience nous a montré que parfois, lorsque les processus ne sont pas analysés en profondeur, la réforme du système électoral peut avoir des conséquences inattendues. C’est pourquoi, nous pensons qu’il est nécessaire d’étudier cette question en détail et d’avoir des débats autour de celle-ci », recommande Nicholas Matatu.

Me Halidou Ouédraogo, président de la CODEL, a révélé la nécessité pour tous les acteurs d’œuvrer pour des élections apaisées.

Pour le président de la CODEL, Me Halidou Ouédraogo, qui est revenu sur le travail fait par son organisation depuis 2015, cette réflexion s’impose pour des élections apaisées. « Nous avons constaté, après la série des élections qui se sont déroulées au Burkina, au niveau des élections présidentielle et législatives en 2015, il n’y a pas eu de problème, mais au niveau des élections locales, la désignation des maires a connu beaucoup de problèmes », rappelle-t-il, soulignant que c’est en tirant leçon de cette situation que cette réflexion a été initiée.

Outre des leaders d’organisations de la société civile, l’activité a regroupé, entre autres, des responsables et représentants de partis politiques, des élus nationaux et locaux.

Vue partielle de participants, avec Souleymane Ouédraogo, alias Basic Soul du Balai Citoyen (2ème à partir de la gauche).

Pour rappel, l’atelier est organisé par l’IFES, en partenariat avec la CODEL grâce au financement de l’USAID (Agence des États-Unis pour le développement international) à travers son appui au projet intitulé « Promouvoir des élections paisibles, transparentes et inclusives au Burkina Faso ».

O.L

Lefaso.net

Source: LeFaso.net