Ce mardi 12 septembre 2023, s’est tenue le procès qui oppose la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso (CCI-BF) à Martin Sawadogo, au Tribunal de grande instance Ouaga 1. Ce dernier est poursuivi pour des faits de diffamation et d’injures publiques contre les différents dirigeants de l’institution étatique. A la barre, il a soutenu vouloir à travers son post Facebook, choquer l’opinion pour qu’un regard particulier soit jetté sur la gestion et le fonctionnement de la CCI-BF. Il veut que l’institution soit dissoute.
« La CCI-BF est un monstre au service des intérêts français. » Voilà un extrait du texte de Martin Sawadogo sur lequel les parties au procès se sont longtemps expliqués en cette soirée du 12 septembre 2023. Selon lui, le fonctionnement de la CCI-BF ne permet pas de prendre en considération les intérêts des entreprises burkinabè. « La CCI-BF gère des infrastructures marchandes comme Ouaga inter. Vous verez qu’à ce niveau par exemple, la partie la plus intéressante qui est la manutention des marchandises a été confiée à une entreprise de Bolloré. Je n’ai pas besoin de vous faire l’historique de Bolloré, mais dans tous les pays africains où il intervient, on lui a toujours reproché sa manière de fonctionner. Les entreprises françaises défendent leurs intérêts mais moi aussi j’ai le devoir de défendre les intérêts des entreprises burkinabè » dira t’il.
Au cours de cette audience, plusieurs éléments seront abordés pèle mêle. Il évoquera par exemple le fait qu’il ait fait deux ans à la CCI-BF en tant que chargé de mission, mais sans jamais avoir une lettre de mission. « Plus tard quand je l’ai reçue, on m’a fait savoir que j’étais affecté au comité chargé de l’évaluation du Plan national de développement économique et social (PNDES). J’ai dit que je ne voyais pas le rapport » s’est-il expliqué.
Pour ce qui est de la création de son association dénommée CCI-BF, Martin Sawadogo soutient que la loi permet qu’il y ait plusieurs Chambres de commerce. Et c’est donc sur cette base qu’il a créé cette association, mais après avoir quitté la CCI-BF.
De ses dires, l’institution souffre de plusieurs maux qui méritent que l’on s’y penche véritablement. Il réclame au besoin qu’elle soit dissoute car elle ne fait pas l’affaire des burkinabè. « Ce ne sera pas la première fois qu’on le fait. Je rappelle qu’elle a déjà été dissoute par deux fois dans le passé » soulignera t-il. Il est à noter que toutes les allégations du prévenu ont été appuyées de pièces justificatives.
Pour Amidou Kobré, conseiller juridique de la CCI-BF, les déclarations de Martin Sawadogo sont assez graves et peuvent mettre en péril l’institution, au regard du contexte que traverse le pays. « Lorsqu’il dit que la CCI-BF sert les intérêts français, il n’y a aucun élément de preuve pour établir cela. Il a justifié cela par le fait que Bolloré gère un terminal, alors que ce n’est pas la seule société qui gère les terminaux. Le problème avec le contexte actuel c’est que dès lors qu’on évoque des sujets sensibles de ce genre, ou qu’on dit que telle autorité ou structure publique gère les institutions françaises, ça peut créer d’autres problèmes » dira t-il. Dans ses réquisitions, le conseil de la CCI-BF, Me Yves Somda, réclamera d’abord 1 franc symbolique. Ensuite que la décision soit publiée dans trois journaux de la place pendant trois mois. Enfin, 1 million fcfa pour les frais non compris dans les dépens.
Le parquet dans ses observations fera observer que l’on sent chez le prévenu, un désir de vouloir changer les choses, même si la manière de le dire laisse beaucoup à désirer. Il fait allusion ici au fait que Martin Sawadogo ait qualifié la chambre de commerce de monstre. Toutefois, dans ses réquisitions, il demandera que le tribunal le relaxe.
Pour les conseils du prévenu, leur client etait animé d’une bonne foi en faisant cette publication. Quant à la CCI-BF, « elle devra accepter les critiques. » « La CCI-BF fonctionne normalement mais il faut qu’elle accepte les critiques. Dans toute institution, que ce soit au barreau ou au Conseil supérieur de la magistrature (CSM), il y a des critiques qui sont effectuées. Elles doivent permettre aux institutions de grandir davantage et c’est ce que les gens doivent apprendre à accepter dans ce pays » a souligné Me Paul Kéré.
Le verdict est attendu pour le 26 septembre 2023.
Erwan Compaoré
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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