Il est environ 8 heures ce mardi 8 juillet 2025, lorsqu’une scène aussi banale qu’indigne se produit en pleine circulation, au quartier Larlé de Ouagadougou. Une dame, élégamment vêtue, baisse la vitre de son véhicule pour jeter négligemment un sachet d’eau vide sur la chaussée. Un homme, témoin de la scène, ramasse le sachet, court vers le véhicule immobilisé au feu rouge, et le relance dans l’habitacle. Silence. Puis, murmures des passants.
Cette scène, anodine pour certains, est pourtant un miroir cruel de notre quotidien. Le jet de déchets plastiques est devenu une habitude si répandue qu’elle en est presque tolérée. Ce n’est pas un problème d’assainissement uniquement, c’est une question de mentalité. Ce geste, en apparence mineur, est parfois à l’origine d’une catastrophe qui revient chaque année comme un cauchemar cyclique : les inondations.
Un acte devenu banal, mais souvent lourd de conséquences
Chaque saison pluvieuse emporte avec elle son lot de drames : pertes en vies humaines, quartiers précaires inondés, destruction de biens et de récoltes, routes impraticables… Les causes sont bien connues : infrastructures de drainage des eaux usées insuffisantes, urbanisation non maîtrisée… mais aussi et surtout le comportement irresponsable de certains citadins.
Les caniveaux, lorsqu’ils existent, sont obstrués par des sachets plastiques, des bouteilles vides, des restes alimentaires – tout ce qui aurait dû finir dans une poubelle… si seulement les villes en étaient convenablement équipées. À cette situation déjà critique s’ajoute une culture du « jet », une forme de paresse civique renforcée par l’impunité généralisée.
Qui a déjà vu une contravention infligée à un automobiliste ou un piéton qui jette ses déchets ? Qui a été puni pour avoir volontairement bouché un caniveau avec des ordures ménagères ? Tant qu’aucune sanction ne viendra rappeler l’exigence de responsabilité individuelle, les déchets continueront de se retrouver dans les rues et les rues sous les eaux.
Combattre le laxisme collectif
L’homme qui a réagi ce matin n’a pas seulement ramassé un sachet. Il a posé un acte fort qui mérite d’être salué. Le changement ne viendra pas uniquement d’un décret, d’un arrêté ou d’un plan d’assainissement, mais de multiples gestes individuels portés par un sentiment de responsabilité.
Que serait notre pays si chacun devait jeter ses déchets plastiques dans la rue ? Le Burkina deviendrait l’Atlantide. Un pays sous les eaux. Les inondations ne sont pas uniquement la conséquence des fortes pluies. Elles sont surtout le résultat direct de nos choix quotidiens. Nos rues deviennent des fleuves de plastiques, nos caniveaux, des « tombeaux » à ciel ouvert. Et à chaque orage, la ville nous renvoie nos négligences comme un boomerang. C’est le fruit amer de notre laxisme collectif.
Les municipalités doivent sortir de leur léthargie. Il faut multiplier les poubelles publiques dans les rues, les marchés, les carrefours, les gares routières, etc. Il faut également renforcer les appuis aux initiatives communautaires de recyclage, de collecte et de nettoyage.
Le combat contre l’insalubrité – et, par extension, contre les inondations – ne se gagne pas uniquement avec des machines et des budgets. Il doit d’abord être remporté dans les consciences, à travers les gestes du quotidien. Espérons que la Brigade Laabal (droiture en fulfulde, ndlr), créée pour traquer les inciviques, viendra véritablement à bout des pollueurs une fois opérationnelle.
HFB
Lefaso.net
Source: LeFaso.net
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