La deuxième loi de finances rectificative pour l’exécution du budget de l’Etat, gestion 2016 a été adoptée le 25 juillet dernier. Pendant que le gouvernement se vante d’avoir présenté pour la première fois de notre histoire un budget équilibré, les détails sur cette loi de finance commence à faire jour, et cela n’est pas beau à lire !

Des mauvaises nouvelles pour la consommation

Pendant que tout le monde se plaint de la morosité du climat économique, le gouvernement Thiéba ne trouve pas mieux à faire que d’enfoncer le clou dans le cercueil de notre économie déjà moribonde. En effet au lieu de nous proposer des réductions de taxes pour relancer la consommation et ainsi soutenir l’économie, c’est plutôt à des augmentations tous azimuts que nous assistons, depuis la petite bière rafraichissante jusque dans les jeux du hasard ! C’est une attaque sans précédent sur le consommateur burkinabè.

D’une part, la taxe sur les propriétés sera passée directement aux locataires par les propriétaires, pour ce qui est des propriétés mises en location. Quant aux terrains nus, ils risquent bien de rester encore très longtemps sans être mis en valeur, histoire de reporter à plus tard la facture en matière de taxes. Il ne faut pas être devin pour entrevoir les répercussions sur les ventes des matériaux de construction, les salaires et les emplois dans le secteur de la construction. Nul besoin de signaler les baisses que cela entraine au niveau de la collecte des fonds : TVA, IUTS, etc.

D’autre part, on peut bien se demander si la taxe sur les véhicules de tourisme aura un impact quelconque. En effet, les plus grands acheteurs sont exempts de la taxe ! Pour le reste, il s’agit encore plus de sociétés privées que de particuliers. Ici encore, c’est le consommateur burkinabè qui paiera au bout du compte, puisque les frais de production des biens ou des services qu’il consomme augmente.

La taxe sur la bière, elle n’affectera qu’une partie de la population, mais là encore, le consommateur aura le choix de réduire sa consommation. C’est bien ce que nous faisons tous pour joindre un mois à l’autre ! De plus lorsque l’on sait les marges réduites avec lesquelles les vendeurs de boissons doivent faire, on peut s’attendre à ce qu’un bon nombre mette la clef sous le paillasson, les travailleurs allant grossir le lot combien déjà grand des sans-emplois. Chose qui, elle aussi réduira de fait l’assiette fiscale ! A moins que beaucoup passe à la sucrerie, chose qui n’est pas sans implications propres que nous verrons plus tard.

En somme, les mesures prises par le gouvernement auront toutes, une tendance à faire baisser la consommation, donc à ralentir l’économie. Nous ne serons point surpris, si effectivement dans 6 mois les recettes se montrent bien en dessous des expectations et qu’il faille faire passer une autre rectification du budget !

Plusieurs autres choix étaient possibles

Et pourtant, on aurait pu faire autrement. Il n’y a pas de doute qu’il faut élargir l’assiette des collectes au profit du contribuable. Cependant, le gouvernement disposait de plusieurs options. Il aurait pu faire des choix qui auraient relancé la consommation tout en collectant les fonds nécessaires. Quelques exemples :

On peut élargir l’assiette des recettes en augmentant le nombre des contribuables. Cela veut dire une politique qui permet de mettre beaucoup plus de gens au travail. On pourrait par exemple réduire les charges sur les employeurs afin de les inciter à créer plus d’emplois. On pourrait relaxer les règles quant aux licenciements et aux emplois temporaires. Ce sont autant de mesures qui ont prouvé leur capacité à créer des emplois dans plusieurs autres pays.

On peut aussi élargir l’assiette fiscale en encourageant la consommation. Par exemple, la réduction du prix du ciment pourrait déclencher un boom dans la construction. Le contribuable profite des reversements en TVA, de l’IUTS sur les salaires à cause des emplois supplémentaires crées, etc.

Toujours dans la relance de la consommation, une baisse des taxes aéroportuaires, des prélèvements sur les hôtels, auberges etc. pourraient contribuer à faire du Burkina une destination de choix par la baisse des prix des billets, des couts des hôtels, etc. Et le touriste ou l’expatrié burkinabè qui rentrerait au BF, y dépenserait son argent, toute chose qui ne peut que profiter à l’économie. On n’accroit pas le nombre de passagers aérien du Faso (comme annoncé dans le discours sur l’état de nation) avec des discours ; Il faut des mesures concrètes.

Au lieu de taxer les véhicules de tourisme, on aurait pu réduire les taxes et ainsi impulser un renouvellement du parc automobile nationale, toute chose qui ne peut que bénéficier à la sécurité routière, à l’environnent et au cadre de vie, et une fois encore au fisc du fait du nombre accru des transactions.

Pendant que le monde entier est en train de réfléchir sur une taxe sur le sucre du fait que le diabète est devenu un sérieux problème de santé publique, pendant que le principe est déjà acquis dans certains pays, le Faso passe à côté de la plaque. Pourquoi ne pas taxer les boissons sucrées et ainsi protéger nos enfants contre les carries et l’obésité ? Que dire des cigarettes, cigares et autres tabac ? Quelle sera leur incidence sur le cout de l’assurance maladie que le gouvernement veut établir ? Plusieurs options étaient possibles pour répartir les 30% de façon plus équitable !

Equilibrer un budget ne peut pas juste se résumer à des mesures fiscales ! Il faut l’accompagner de mesures d’économie. Nul ne peut vivre au déçu de ses moyens. Si l’argent n’y est pas, il faut bien faire des coupes pour équilibrer les comptes plutôt que de chercher à réunir l’argent, peu importe la façon ! Quand on demande des sacrifices aux contribuables, il faut soi-même faire des sacrifices. La réduction du train de vie de l’Etat doit être une priorité ! Quand comme en 2015 presque 70% des recettes passe dans les salaires, la dette et le fonctionnement, il convient de réagir promptement ! Quelles économies peut-on réaliser par exemple en supprimant les véhicules de l’état ? En réduisant le nombre de séminaires, de missions à l’étranger aussi bien du gouvernement, du parlement que de la fonction publique ? En fusionnant les forces de police ? Cherchez les gaspillages et vous trouverez les économies !

Conclusion

Le budget que l’on vient de nous servir est un budget sans imagination. Il y a un déficit, alors on trouve des nouvelles taxes pour le combler ! Il n’y a aucun mérite à cela, vraiment aucun ! Le Dr. A. Ouédraogo parle à raison de « faire en moins bien, du Blaise Compaoré sans Blaise Compaoré » !

L’opposition a bien critiqué, et s’est abstenu do vote. Nous attendons de voir leurs propositions de budget. C’est seulement ainsi qu’ils nous convaincront qu’ils peuvent offrir une alternative.

Koudraogo Ouedraogo

Blog : http://burkinnafache2015.wordpress.com

Membre, Faso 2020 : http://faso2020.org

“Oser inventer un Burkina nouveau”

Source: LeFaso.net