« Le rôle des institutions traditionnelles dans la promotion d’une paix durable en Afrique ». C’est autour de ce sujet que s’est ouverte, ce jeudi 30 novembre 2023 à Ouagadougou, sur initiative du Merian institute for Advanced studies in Africa (MIASA, en français, Institut pour les hautes études en Afrique Maria Sibylla Merian), une conférence thématique. Une douzaine de nationalités, des chercheurs, prennent part à ce cadre de réflexion qui s’étend au 2 décembre 2023.

Le continent africain a la réputation d’être le continent le plus coutumier des conflits, qu’ils soient intra-communautaires, inter-communautaires ou inter-étatiques. Ces conflits africains diffèrent selon leur intensité, leur durée et leur extension territoriale ainsi que leur nature. « Nous observons aussi bien les conflits inter-étatiques que les conflits intra-étatiques, les conflits armés que les conflits non armés, les conflits liés aux ressources naturelles que les conflits à caractère ethnique. Quoi qu’il en soit, les conflits ou les guerres ne sont pas une fin en soi, mais sont fondamentalement liés à la notion de paix. (…). Dans le contexte d’une sortie de conflit, l’essentiel n’est pas d’obtenir une paix scellée entre les belligérants ou les acteurs du conflit, mais d’arriver à une situation où cette paix s’inscrit de manière durable dans les relations entre lesdits acteurs », lit-on dans les termes de référence de la conférence.

Les participants sont d’une douzaine de nationalités, anglophones et francophones.

La conférence va donc explorer les institutions traditionnelles dans leur complexité, en tant qu’acteurs-clés dans les conflits ainsi que leur contribution potentielle pour la promotion d’une paix durable en Afrique. Elle invite à cet effet les chercheurs de différentes disciplines à débattre sur plusieurs questions, dont le rôle des institutions traditionnelles dans les processus de paix et l’établissement d’une paix durable en Afrique ; les modalités de prise en compte des institutions traditionnelles dans les mécanismes nationaux et internationaux de résolution des conflits et de construction d’une paix durable ou encore l’avenir des institutions traditionnelles de médiation et de paix dans le futur africain.

Selon Pr Ludovic Kibora, directeur de l’Institut des sciences des sociétés du Centre national de la Recherche scientifique et technologique (INSS-CNRST), le thème a été fixé en tenant compte du contexte africain, marqué par beaucoup de zones de conflits. « Lorsqu’on regarde dans les statistiques au niveau mondial, on sent que l’Afrique est un continent qui se développe, qui bouge, mais en même temps un continent où il y a un peu de conflits, un peu partout. Par rapport à cela, on a voulu réfléchir sur cet aspect ; souvent dans les conflits violents, ce sont les institutions traditionnelles qui sont sollicitées pour des solutions de sortie de crises. C’est pour cela qu’il ne faut pas les négliger, il faut voir comment elles peuvent toujours contribuer, comment on peut toujours tirer profit d’elles et c’est cela qui nous amène à mettre en réflexion ce sujet. C’est dans tous les pays africains pratiquement que cela est nécessaire », explique Pr Kibora, qui revient également sur les démarches qui ont abouti à la tenue de la conférence au Burkina.

Pr Ludovic Kibora jauge également l’enjeu du thème par rapport à la situation de crise que traverse le Burkina.

« Nous avons été sollicités pour proposer des thèmes de conférences. Nous avons donc proposé ce thème-là sur les institutions traditionnelles dans la résolution des conflits, qui a été retenu. Généralement, les conférences ont lieu à MIASA, à Accra, mais je crois que pour des questions de disponibilité de certaines personnes, et comme c’est nous qui avons proposé le thème, il a été jugé intéressant que ce soit nous également qui l’organisions, surtout que nous sommes membre du réseau point sud, avec le CGD et d’autres organisations et universités à travers le monde », dit-il.

La conférence thématique, réduite aux participants, se déroule à travers des tables-rondes, des panels et des présentations individuelles.

« C’est en cela que c’est important ; il y en a qui ont prévu de montrer des stratégies, d’autres des exemples qui se sont déroulés dans tel ou tel pays et on pourra toujours en bénéficier. Vous avez dû voir ce qui s’est passé en Afrique du Sud après que Nelson Mandela soit sorti de prison, ce qui est intervenu au Rwanda en terme de justice transitionnelle après le massacre qui a eu lieu en 94 ; donc, il y a tous ces exemples-là qui vont être proposés et chacun va voir qu’est-ce qui a pu marcher, ce qui n’a pas marché, ce qu’on peut faire et ce qui peut être exporté et employé par d’autres », décline Pr Kibora.

Dr Susann Baller, directrice du MIASA, relève que parfois, dans le monde politique, la pratique est souvent très compliquée et est fonction des zones, des acteurs… ; ce qui nécessite un débat beaucoup plus complexe pour comprendre les conflits et trouver les chemins vers la paix.

Selon Dr Susann Baller, le débat doit aller au-delà de l’espace linguistique, anglophone, francophone, etc.

« Notre thème global (le MIASA, ndlr), c’est la gouvernance durable, avec l’objectif aussi de soutenir et agrandir l’importance de la production du savoir africain dans ces débats, d’une manière très critique. Un de nos sous-sujets, c’est la paix durable et nous cherchons à accroître le débat sur comment discuter sur la paix et les conflits en Afrique en général et en Afrique de l’Ouest en particulier », situe Dr Susann Baller, précisant qu’un rapport sera rédigé à la fin des travaux pour être mis en ligne afin de rendre accessibles les conclusions.

O.L

Lefaso.net

Source: LeFaso.net